Mise en avant pour son travail "La vie et au-delà", sur les pratiques funéraires à l'aune des mutations sociétales.
Bertrand Desprez, (promotion photo 1988), est l’auteur de quatre monographies, mais également lauréat du Prix de la fondation CCF pour la photographie (1997) et du Prix Kodak de la Critique (1999).
Ses photographies sont régulièrement publiées et exposées et ont intégré entre autres collections celles de la Fondation CCF pour la photographie, du Fonds National d’Art Contemporain ou de la Collection HSBC.
Son travail « des hommes et des géants sera exposé en octobre prochain à Wilson (Etats Unis) »
A propos de son travail pour la Grande Commande :
« La Vie et au-delà.
Ils s’appellent Jean-Luc, Sandra, Pascal, Virginie…. Ils sont porteurs, agents funéraire, responsables de crématorium, maître de cérémonie, thanatopracteurs.
On évoque rarement en société leur existence ou leur quotidien mais ils occupent une place centrale dans nos vie même si, à plus forte raison pendant cette période de pandémie, ils travaillent dans l’ombre. Les chiffres, parfois abstrait, sont éloquent : 600 000 décès en ??? dont 120 000 du Covid.
On se souviendra longtemps du traumatisme que fut l’interdiction faite aux familles d’accéder à l’enterrement de leur proche.
On retrouve bien évidemment cette « disparition » de la mort au sein même de la pratique photographique. Au XIXe, on meurt « en famille », au cœur de la maison : c’est à ce moment que se développe la pratique de la photographie post mortem, à la fin du 19ème siècle puis au début du 20ième. Prendre en photo un proche décédé est une étape qui paraît plus « naturelle » qu’aujourd’hui. Cette ultime photo était un moyen de garder une trace de la personne disparue.
C’est au milieu XXe, que le portrait post-mortem commence à s’essouffler, notamment avec la mise en place de lois visant à protéger la vie privée, dont celle des morts. J’ai malgré tout le souvenir de la série « Totengesichter, » portraits de morts réalisés par Rudolf Schäfer et publié dans un magazine littéraire à la fin des années 1990.
En ce début de 21ème siècle, le temps du deuil tend à disparaître. La mort est comme « neutralisée » au sein de notre société. Sa réalité, ses conséquences, sont souvent tues ou cachées (sauf peut-être dans le cas des attentats commis dernièrement).
Et pourtant, des vivants prennent soin de nos défunts et c’est l’objet de ce reportage de mettre en lumière cette spirale temporelle sous la forme de paysages humains post mortem. Raconter des histoires d’hommes et de femmes dont on ne parle jamais qui prennent soin de ce moment si particulier de nos existences fragiles.
De Cherbourg où officie Virginie, maitre de cérémonie, au marbrier près de Castres, de Bar-le-Duc où Jean-Luc accueille plus de 200 familles par an au crématorium à Bourges où Pascal chauffeur-porteur est en première ligne, de Jussey dans le Jura où des forestiers achètent le bois destiné à la fabrication des cercueils ou encore Marilou qui s’occupe des toilettes mortuaires au Mont Valérien.
Mais la mort est avant tout un enjeu économique, sociétale et écologique. Les nouvelles pratiques funéraires comme la crémation sont énergivores. Déjà les pays nordiques proposent des formes plus écologiques en adéquation avec les cycles de la nature. Les paysages post mortem évoluent. En attendant les évolutions du transhumanisme !… »
Questions à Bertrand Desprez :
Que vous a apporté la Grande Commande ?
La grande commande m’a permis de montrer les invisibles, ces personnes qui s’occupent des morts avec beaucoup d’humanisme. La difficulté rencontrée est le tabou face à la mort en France, plus facile de montrer les enterrements en Ukraine ou les charniers (filmés avec des drônes…)
Un souvenir de l’ENS Louis-Lumière ?
Retrouvez ci-dessous une sélection des clichés du photo-reportage.
Crédits photo : Bertrand Desprez
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